Sédation palliative : apaiser la souffrance en phase terminale

Sédation palliative

En phase terminale d’une maladie grave, le soulagement de la souffrance est une priorité des soins palliatifs. Cependant, il arrive que la douleur ou d’autres symptômes ne puissent plus être apaisés par les traitements habituels. Dans ces situations extrêmes, les médecins peuvent avoir recours à la sédation palliative afin d’assurer le confort du patient en fin de vie.

La sédation palliative consiste à administrer des médicaments sédatifs pour diminuer intentionnellement le niveau de conscience d’une personne en fin de vie. Elle se distingue des autres soins par le fait qu’elle plonge le patient dans un état proche du sommeil afin d’atténuer la perception de la douleur ou de la détresse. Cette intervention n’est envisagée qu’en dernier recours, lorsque la souffrance est dite « réfractaire » – c’est-à-dire qu’aucun traitement ne parvient à la soulager suffisamment.

Qu’est-ce que la sédation palliative ?

La sédation palliative est un acte médical consistant à réduire de façon contrôlée l’état de vigilance d’un patient en fin de vie grâce à des médicaments sédatifs. Autrement dit, le médecin administre des substances qui provoquent un sommeil profond ou une forte somnolence, dans le but de soulager des symptômes réfractaires que le patient juge insupportables (douleurs intenses, étouffement, angoisse extrême, etc.). Contrairement à l’euthanasie, l’objectif n’est pas de provoquer le décès du patient mais d’apaiser ses souffrances.

Douleurs

La sédation palliative s’inscrit toujours dans un contexte de fin de vie très avancé. Elle n’est envisagée que si le patient est atteint d’une maladie incurable en phase terminale, avec une espérance de vie très courte (quelques jours ou semaines tout au plus). Dans ces situations, la sédation offre la possibilité au patient de ne pas endurer consciemment les symptômes agonisants de sa pathologie lors de ses dernières heures.


Les différentes formes de sédation en fin de vie

En pratique, on distingue deux formes de sédation palliative en fin de vie, selon l’objectif visé :

  • Sédations symptomatiques proportionnées – Ce terme désigne les sédations partielles et temporaires, ajustées à l’intensité des symptômes. Par exemple, un patient peut recevoir des doses modérées de sédatifs pour calmer une anxiété ou une douleur aiguë, tout en restant réveillé par intermittence. Ce type de sédation est potentiellement réversible et laisse au patient la possibilité de garder certains moments d’éveil et d’échanges avec ses proches.
  • Sédation profonde et continue jusqu’au décès – Il s’agit d’une sédation beaucoup plus profonde, instaurée de façon continue sans intention de réveil. Le patient est plongé dans un sommeil profond et le restera jusqu’à son décès naturel. Cette forme est mise en œuvre dans les cas de souffrance réfractaire en phase avancée, et entraîne l’arrêt des traitements curatifs ou de maintien en vie (par exemple l’arrêt de la nutrition et hydratation artificielles).

Quand recourir à la sédation palliative ?

La décision de pratiquer une sédation palliative est toujours réfléchie et collégiale. Elle n’intervient qu’après avoir épuisé toutes les autres options pour soulager le patient. Autrement dit, tant qu’il existe des traitements ou mesures capables d’améliorer la situation (médicaments, interventions non médicamenteuses, accompagnement psychologique, etc.), la sédation n’est pas envisagée. En revanche, si un ou plusieurs symptômes s’avèrent incontrôlables malgré des soins optimaux, et que le patient est en fin de vie immédiate, l’équipe médicale peut proposer une sédation palliative afin d’éviter des souffrances prolongées.

Les symptômes justifiant une sédation sont dits « réfractaires ». Il peut s’agir de douleurs physiques, de détresse respiratoire ou d’autres formes de souffrance extrême. Voici quelques exemples de situations pouvant conduire à une sédation palliative en fin de vie :

  • Douleur insupportable et incontrôlée malgré l’administration d’antalgiques puissants (comme la morphine).
  • Détresse respiratoire aiguë avec sensation d’étouffement, ne répondant pas aux traitements (oxygénothérapie, morphiniques, etc.).
  • Agitation ou délire terminal sévère, que les calmants usuels (sédatifs à doses modérées) ne parviennent pas à apaiser.
  • Angoisse psychique ou détresse existentielle écrasante, insensible aux soutiens psychologiques et aux médicaments anxiolytiques habituels.
  • Hémorragie catastrophique imminente (par exemple, saignement massif d’une tumeur) pour laquelle une sédation en urgence est proposée afin d’épargner au patient la perception d’une fin de vie très traumatisante.

Une sédation palliative peut donc être instaurée de manière anticipée (lorsqu’on identifie qu’un symptôme risque de devenir réfractaire) ou parfois de manière très rapide en situation d’urgence.


Comment se déroule une sédation palliative ?

La mise en œuvre d’une sédation palliative obéit à un protocole médical strict et collégial. Elle peut avoir lieu dans une unité de soins palliatifs à l’hôpital, en hospice, et parfois au domicile du patient ou en EHPAD, à condition qu’une équipe soignante puisse assurer une surveillance adéquate. Les étapes principales du déroulement sont les suivantes :

  1. Prise de décision collégiale et préparation – La décision de lancer une sédation est prise collégialement par l’équipe médicale (médecin référent, infirmiers, autres spécialistes), en concertation avec le patient s’il peut s’exprimer. Le consentement du patient est recherché systématiquement et ses volontés (ou directives anticipées) sont prises en compte au maximum. Le médecin explique le but de la sédation au patient et à ses proches. Ensuite, un plan est établi : choix du médicament sédatif (le plus souvent le midazolam), voie d’administration (perfusion intraveineuse ou sous-cutanée), et organisation de la surveillance. Il est décidé également quels traitements en cours sont maintenus ou stoppés (par exemple, on interrompt les perfusions d’hydratation artificielle si elles ne contribuent plus au confort).
  2. Induction de la sédation – Le médicament sédatif est administré en augmentant progressivement la dose jusqu’à obtenir le niveau de sédation souhaité. Cette titration progressive vise à procurer un apaisement suffisant sans excès de médication. Le patient s’endort peu à peu. Durant cette phase initiale (souvent les 15 à 30 premières minutes), un soignant reste en permanence auprès du patient pour surveiller l’évolution de son état et parer à tout effet indésirable éventuel (par exemple, des troubles respiratoires ou un encombrement bronchique).
  3. Maintien de la sédation et surveillance – Une fois le patient plongé dans un sommeil profond et confortable, la perfusion de sédatif est poursuivie en continu (via une seringue électrique par exemple) pour maintenir cet état jusqu’à la fin de vie. Régulièrement, l’équipe évalue les signes vitaux et s’assure que le patient ne montre aucun signe de souffrance (mouvement, grimace, agitation). Les traitements contre la douleur (morphine, etc.) et autres soins de confort sont maintenus ou ajustés parallèlement : le fait d’être endormi n’empêche pas de continuer à traiter la cause de la douleur ou d’autres symptômes. On veille également à garder le patient installé confortablement, à hydrater sa bouche, à protéger sa peau contre les plaies, etc.
  4. Accompagnement des proches – Tout au long du processus, l’équipe informe régulièrement la famille de l’état du patient et de l’évolution de la situation. Les proches sont encouragés à rester près du patient s’ils le souhaitent, pour lui parler ou simplement veiller sur lui. L’absence de réaction du patient peut être déroutante pour les proches, mais le fait de savoir qu’il ne souffre plus constitue souvent un soulagement pour eux. Bien que le patient ne réagisse plus, il reste présent et continue à recevoir les soins qu’il lui faut avec respect. Un soutien psychologique peut être proposé aux proches, notamment si la situation est difficile à vivre. L’équipe soignante, habituée à ce type d’accompagnement, veille à créer un climat serein autour du patient jusqu’au décès.

Sédation palliative et euthanasie : quelles différences ?

Il convient de bien distinguer la sédation palliative de l’euthanasie, car ce sont deux approches très différentes de la fin de vie. En France, la sédation profonde et continue jusqu’au décès est autorisée par la loi (loi Claeys-Leonetti de 2016) dans des situations précises de souffrance réfractaire, tandis que l’euthanasie y demeure interdite.

En Belgique, au contraire, l’euthanasie est légale (loi de 2002) pour les patients qui la demandent et remplissent certaines conditions strictes, alors que la sédation palliative y est considérée comme une pratique courante des soins palliatifs (sans procédure légale spécifique). Le tableau suivant résume les différences générales entre la sédation palliative et l’euthanasie :

Aspect Sédation palliative Euthanasie
Intention Soulager la souffrance sans chercher à provoquer le décès. Faire cesser la souffrance en provoquant directement la mort du patient.
Demande du patient Consentement souhaité (si le patient est conscient), mais peut être décidée par l’équipe médicale dans l’intérêt du patient incapable d’exprimer sa volonté. Doit provenir d’une demande explicite, répétée et volontaire du patient (qui doit être conscient au moment de la demande).
Procédure Administration de sédatifs (ex : midazolam) pour plonger le patient dans l’inconscience tout en continuant les soins de support. Injection de substances létales (ex : barbituriques) provoquant la mort rapide du patient.
Issue pour le patient Le décès survient à court terme, de manière naturelle, sous l’effet de la maladie (éventuellement anticipé de quelques heures ou jours par l’arrêt des fluides). Le décès est provoqué activement par le médicament, en général en quelques minutes.
Cadre légal Encadré par des directives médicales et éthiques (en France, consacré par la loi de 2016). Légal dans certains pays sous conditions strictes (autorisé en Belgique, interdit en France).

La sédation palliative reste avant tout un traitement de la souffrance intégré aux soins palliatifs, tandis que l’euthanasie est un acte distinct qui vise explicitement à provoquer la mort du patient dans un but de soulagement. Ces deux pratiques diffèrent fondamentalement par leur intention, leurs modalités de mise en œuvre et leur statut légal.

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